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Néolibéralisme militaire

À l’heure où la guerre aux portes de l’Europe rentre de plus en plus dans l’insignifiance, il est toujours intéressant de voir les motifs qui expliquent une telle guerre. Par-delà les conceptions géopolitiques traditionnelles, qui ne sont pas par ailleurs forcément fausses, il y a toujours mille manières pour un État de justifier une guerre.

Globalement, la plus grande puissance militaire du monde est un pays régi par le besoin vital de guerre. Le budget de l’armement aux États-Unis est d’environ sept cent cinquante milliards, écrasant toute concurrence, même chinoise. Le lobby de l’armement est aujourd’hui le point central de la gouvernance américaine, c’est devenu une évidence aux yeux de tous. Le néolibéralisme se dévoile sous une de ses formes les plus claires, avec un président fantôme qui n’arrive plus à se cacher de son inutilité, le nombre de ses erreurs et de ses humiliations est de plus en plus frappant. Il sert évidemment de pantin, avec une certaine forme d’assomption de son rôle symbolique qui le rend assez singulier. Le rôle des lobbys d’armement dans l’influence des élections est aujourd’hui documenté, tout comme il paraît évident qu’elle dicte la bonne conduite à mener une fois le gouvernement élu. Le postulat de l’économie reine qui gouverne est sans cesse vérifié par la réalité des États-Unis, le néolibéralisme roi. Un néolibéralisme militaire qui forme une puissance redoutable et une réalité effrayante. Le gouvernement à la maison blanche a donné sa place aux lobbys d’armements. La guerre en Ukraine est malheureusement un nouvel exemple. Quoi de mieux qu’une bonne guerre pour cette économie. On devrait parler de marché plutôt que de guerre, marché militaire. Il est évidemment dur de penser avec nos yeux d’incrédules l’atrocité de ces entreprises, de ses hommes et leurs pensées qui ne voient dans la mort de milliers d’hommes et femmes qu’une grande jouissance économique. Ce désir économique est souvent l’élément central de beaucoup de guerres. L’économie reine c’est concrètement ceci : être capable de désirer une guerre, d’exprimer le plus beau des sourires à la face de tous ces corps inanimés.

Après le nœud du Moyen-Orient, qui aura occupé la décennie dernière, et la menace islamique qui s’éteint maintenant depuis quelques années, le monde plongeait (en tout cas pour les états occidentaux) dans une forme de paix sans ennemi extérieur concret. Le marché militaire tant désiré n’était plus. De plus, après le départ d’Afghanistan la grande nation américaine se trouvait dans une situation délicate pour justifier son budget militaire. Comment assumer un budget de plus de 700 milliards ? Les chefs des États-Unis devaient commencer à s’inquiéter de cette interruption, la paix est bonne pour le business, mais avec une guerre qui effraie la paix des autres c’est encore mieux.

On le sait depuis 2014 et l’annexion de la Crimée que les États-Unis ont formé l’armée ukrainienne, puis depuis des mois, des années ils savent la venue de cet envahissement. Leur solution n’a pas été d’éviter la guerre, mais bien de la laisser exister pour relancer ce marché de l’armement. On l’a vu avec tous les États européens qui se sont mis à acheter des chars, avions, etc. Personne n’est plus heureux de cette guerre que les marchands. Ils créent des armes dans un premier temps, et dans un second il faut bien fabriquer des acheteurs. Ceci est valable aussi pour les lobbys d’armement européen, Thales en France se frotte les mains depuis février. Cette guerre n’a effrayé aucunement l’ordre des choses, elle est en la continuation la plus banale. Elle n’a pas déstabilisé l’économie de l’Europe. Bien au contraire elle est symptomatique des raisons pour laquelle une guerre peut éclater, de la raison pour laquelle on laisse une guerre durer. L’économie contrôle ce monde, le néolibéralisme militaire continue ses ravages. Et les milliers de morts en sont les victimes collatérales.

Les oligarques ukrainiens, dont Ihor Kolomoïsky qui a été le fer de lance du groupe nazi Asov comme du président Zelinsky, et toutes les pires raclures attendent tranquillement la fin de cette guerre pour pouvoir tirer des bénéfices énormes de la reconstruction. Du côté russe les dizaines de milliers de morts annoncés ne provoquent évidemment aucun froissement de sourcil au Kremlin. Le sang coule, l’argent circule, les pauvres meurent pendant que les dirigeants russes prennent des vacances en Côte d’Azur, rien de nouveau dans le monde de l’économie.

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