Un texte de Pascal Mathis
Cet engagement téméraire, d’autres devaient le tenir, courant janvier 2022, en publiant le Manifeste conspirationniste. Ce livre vaut mieux que le silence gêné que beaucoup lui opposent depuis plus de trois ans, car tout indique sa profonde sincérité. Il est des deuils si douloureux, souvent ceux d’un enfant, qu’ils conduisent les parents à des comportements ségrégés, à l’extérieur ils reçoivent naturellement les condoléances de leurs proches, ils vont se recueillir sur la tombe de celui qui jamais n’aurait dû les quitter, ils portent même des vêtements de deuil, mais une fois rentrés chez eux, ils entretiennent la chambre de leur enfant défunt comme s’il devait rentrer de l’école tout à l’heure, ils lui préparent même un bon goûter et le soir encore ils mettent son couvert. Ces parents endeuillés vivent ainsi, un temps durant, dans deux réalités ségrégées, l’une n’invalidant pas l’autre, la perte et le manque d’un côté, de l’autre la présence de l’être aimé. Il me semble que le Manifeste conspirationniste, tout animé d’un tel être au monde ségrégé, n’a pu être écrit que dans le terrible deuil qui nous frappe depuis trois ans, dans la douleur du manque de cette puissance minimale qui nous semblait acquise. Ceux qui ressentent une telle perte ont tout à gagner à poursuivre jusqu’à son terme la balade hallucinée que propose l’ouvrage.