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Éloge de l’éthique

Un texte de Ezra Riquelme
Certaines personnes ont la vocation de la politique. C’est une chose bien méprisable. D’autres, au contraire, ont une passion effective, mystérieuse et souvent silencieuse. Cette chose est l’éthique et ses chants taciturnes restent étrangers aux personnes animées par cette vocation de la politique. C’est ainsi que l’être occidental déploie la politique comme une programmation d’une éthique à la totalité des formes de vie, conduisant ainsi à la catastrophe que nous éprouvons. De l’Antiquité grecque à la formation des États modernes, l’Occident démontre sa flagrante inconsistance à produire une éthique satisfaisante à ses sujets. D’où le besoin de recourir à la loi comme substance pour colmater la fêlure de cette forme de vie sociale. Ce qui est remarquable dans l’étendue de la fêlure occidentale est son étrangeté à la vie. Il y a donc sur ce vaste territoire de ruine qu’une expérience, celle de la loi. Autrement dit, vivre l’expérience permanente de la catastrophe.

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État et anomie. Considérations sur l’antéchrist

Un texte de Giorgio Agamben
Le terme « antéchrist » (antichristos) n’apparaît dans le Nouveau Testament que dans la première et la deuxième lettre de Jean. Le contexte est certainement eschatologique (paidia, eschate hora estin, vulg. filioli, novissima hora est, « petits enfants, c’est la dernière heure »), et le terme apparaît aussi significativement au pluriel : « comme vous avez entendu dire que l’antéchrist vient et que maintenant beaucoup sont devenus antéchrists ». Non moins décisif est le fait que l’apôtre définit la dernière heure comme le « maintenant (nyn) » dans lequel il se trouve lui-même : « l’antéchrist vient (erchetai, indicatif présent) ». Peu après, il est précisé, si besoin est, que l’antéchrist « est maintenant dans le monde (nyn en to kosmoi estin) ». Il est bon de ne pas oublier ce contexte eschatologique de l’antéchrist, s’il est vrai — comme Peterson, et Barth avant lui, ne se lassent pas de le rappeler — que le dernier moment de l’histoire humaine est inséparable du christianisme.

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Politique et événement

La politique est morte. Ce vieux constat n’a pas pris une ride. Pourtant en France au pays du social et du pouvoir. La politique dit « classique » plus personne n’y croit, même les hommes politiques, mais le problème est ailleurs. On a pu s’en rendre compte lors des dernières élections. Vu l’importance pour certains du vote antifasciste Mélenchon, la politique n’est pas morte pour tous. Les nombreuses publications de radicaux qui appellent à constituer une politique émancipatrice en témoignent. Pourtant l’histoire rappelle sans cesse qu’aucune politique n’a été émancipatrice, c’est tout le contraire qui s’est produit.

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Anges et démons

Un texte de Giorgio Agamben
Les discours que l’on entend si souvent aujourd’hui sur la fin de l’histoire et le début d’une ère posthumaine et posthistorique oublient le simple fait que l’homme est toujours en train de devenir humain et donc aussi de cesser de l’être et, pour ainsi dire, mourir à l’humain. La revendication d’une animalité accomplie ou d’une humanité achevée de l’homme à la fin de l’histoire ne rend pas compte de cette incomplétude constitutive de l’être humain.

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Institution, une politique ecclésiastique

Un texte d’Ezra Riquelme
L’institution est une passion française. On la retrouve à toutes les sauces, que ce soit l’institution républicaine, révolutionnaire, anarchiste, ou même la psychothérapie institutionnelle. La France est le pays de l’institution. Même la Révolution est devenue une institution, qu’on peut exporter aux quatre coins du monde. Cette spécificité française est particulièrement tenace chez les gens cultivés, à force de docilité éducative dans les grands corps de l’État et les écoles supérieures, on ne cesse de rechercher des institutions partout. La passion qu’y vouent les Français est le signe évident de son assimilation totale au christianisme, même si ce pays s’en croit pourtant libéré. Il faut revenir en deçà, revenir sur son histoire, sur sa signification originelle pour cerner ses logiques internes et ses imbrications sur la matérialité de l’existence.

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Le narcissisme, un Moi liquidateur

Un texte de Louis René
Le désastre continue inlassablement son ravage sur les formes de vie humaines et non-humaines, détruisant par la même occasion la matérialité de l’existence de pluralité de ces formes de vie. Le désastre n’est pas simplement le produit d’un système économique et politique d’exploitation, mais résulte d’une façon d’habiter le monde. La question révolutionnaire exige d’être aussi posée dans des termes anthropologiques. Car le désastre émane d’une forme de vie : celle de la vie métropolitaine occidentale qui vampirise la presque totalité de la planète, et espère en vampiriser d’autres. Il faut alors regarder dans ses entrailles pour y voir la texture de ce qui l’anime. Ce que l’on trouve de bien sordide est le narcissisme, ce Moi liquidateur animé par ce désir insatiable d’accaparement et de destruction.

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Cette fiction nommée Société

Un texte d’Ezra Riquelme
Les images se font et se défont, et l’une des plus tenaces est celle de la société. Elle s’impose dès lors comme une fiction, comme une fiction policière. Écrire une fiction, puis l’effacer, ainsi la réécrire une nouvelle fois encore. Tel se constitue le geste de la société : être fait et refait. Dans cette fiction aux effets bien trop réels, la matrice essentielle tient dans le principe d’exclusion/inclusion. Pour intégrer ses proies, la société doit détruire toute hétérogénéité, établir un ordre, ordonner les corps par certaines conduites.

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La mort et les profondeurs de l’angoisse

Un texte d’Ezra Riquelme
Sur les terres crépusculaires s’érige la mort comme une icône de l’angoisse même de la vie. Au Moyen-âge et jusqu’au XVIIIe siècle, la mort s’éprouvait dans la vie quotidienne, avec une certaine « familiarité ». On peut noter par exemple au IVe siècle la « danse des morts » comme l’occasion de réaffirmer la vie, ce que l’Église ne pouvait supporter. À la fin du XVIIIe siècle, la mort s’établit comme sujet d’horreur, les lieux liés aux morts sont dès lors vus comme des lieux de pestilence, de maléfices. Certains cimetières ont subi littéralement un déménagement hors des villes. Le romantisme a participé à un retour de l’exagération du sentiment du deuil, avec le rejet de la mort, de la disparition de l’autre. Ce qui explique qu’aux XVIIIe et XIXe siècles, les lieux liés aux morts sont vénérés. L’arrivée de la médecine moderne transforme une nouvelle fois le rapport avec la mort.

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La vie contre la psychiatrie

Un texte de Zibodandez
À l’heure où la biopolitique parachève son emprise sur nos existences, la situation que connaît la psychiatrie nous apparaît être un cas paradigmatique : alors qu’elle prétend se désinstitutionnaliser, la psychiatrie – qu’il s’agisse de son institution et son en-dehors – n’a probablement jamais autant été à l’avant-garde de la biopolitique.

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Xeniteia. Contemplation et combat

Un texte de Marcello Tarì et Mario Tronti
Qu’elle est douteuse cette idée, désormais conforme au sens commun, selon laquelle nous serions en train de vivre des temps apocalyptiques ! L’impression dégagée par les différents discours qui se succèdent dans l’infosphère est celle d’une superficialité, d’un effondrement qui n’est que « spectacle » d’apocalypse, et non pas celle d’une acception authentiquement prophétique. L’imaginaire de masse est davantage inspiré par les films et les séries TV hollywoodiennes que par le gros volume écrit par Jean dans son exil à Patmos.

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L’ascèse communiste comme dépassement des formes sociales de la vie

Un texte de Louis René
La tragédie a poursuivi l’âme en peine de Georg Lukács. Son expérience de la sinistre et mortifère Première Guerre mondiale fut l’expérience de l’effondrement d’un monde, voyant la plupart de ses amis, de Max Weber à Emil Lask, prendre parti pour la guerre. « Défendre la société », tel était l’impératif catégorique pour en justifier l’horreur. Cette boucherie, lui révéla le véritable visage du social et de son emprise sur les êtres qui, pris dans cet orage d’acier, se voyaient transformés en tueurs sans âmes. Lukács comprit alors la voie à suivre pour sortir du pouvoir des structures sociales s’atteler au plan de réalité d’âme (Seelenwirklichkeit).

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Le communisme des esprits
Communismus der Geister

Un texte de Johann Christian Friedrich Holderlin
Coucher de soleil. Chapelle. Une contrée vaste et riche. Fleuve. Forêts. Les amis. Seule la chapelle est encore dans la lumière. On en vient à parler du Moyen Âge. Les ordres monastiques considérés dans leur signification idéale. Leur influence sur la religion et, en même temps, sur la science. Ces deux orientations se sont séparées, les ordres religieux se sont effondrés, mais est-ce que des institutions du même genre ne seraient pas souhaitables ? Afin de démontrer leur nécessité pour notre temps, nous partons précisément du principe opposé, de la généralisation de l’incrédulité.

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L’élaboration de la fin. Mythe, gnose, modernité

Un texte de Gianni Carchia
Il ne fait aucun doute que l’idée de modernité dominante aujourd’hui est soutenue par la conviction que le lien chrétien entre apocalypse et histoire a été rompu. Ceci a surtout été affirmé avec force par trois interprétations historico-philosophiques, dont il vaut la peine de rappeler ici les principes, justement pour tenter de montrer, par contraste, le sens de ce lien. Il s’agit tout d’abord de la conception soutenue par Hans Blumenberg de la modernité comme lieu de « l’auto-affirmation », ce qui revient à dire comme dépassement tant de la gnose que du dogme, tous deux étant compris comme des variations de l’apocalyptique. C’est une thèse qui a, dans les années récentes, été radicalisée par la philosophie de la compensation d’Odo Marquard, avec une louange de la modernité comme renaissance du polythéisme et abandon de tout schisme utopique. En second lieu, et d’une autre manière, le congédiement de l’apocalyptique se retrouve dans le théorème de la sécularisation élaboré par Karl Löwith.

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Écologie du design, paradigme du pouvoir environnemental

Le pouvoir environnemental désigne la capacité opératoire de rendre une infrastructure technologique invisible, naturelle. L’objectif est d’informatiser l’environnement existant, c’est-à-dire faire de l’environnement un espace écologique d’objets connectés. Chaque relation devient simple interaction, le monde n’est plus, l’environnement est. L’infrastructure de la ville se fait métropole pour déployer son pouvoir environnemental.

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Écosystème, systèmes et gestion idéale

Un texte d’Henry Fleury
Il ne suffit pas de déconstruire les discours politiques sur la nature. L’inanité de ceux-ci sont d’une confondante évidence. Qui peut encore croire que les guignols de n’importe quel gouvernement pourraient nous sortir du désastre en cours ? Plutôt que de débunker chaque prise de parole de ces gens-là, entreprise aussi inutile que dangereuse, il faut remonter à l’origine de ce discours, en faire l’archéologie. C’est à ce compte-là et seulement à celui-ci que nous pourrons mettre au jour la construction philosophique d’une nature composée par l’homme comme objet d’action et de ressources. S’il nous faudrait un temps infini pour démêler les fils de la représentation de la nature et de la philosophie rationnelle totale de l’Occident. Au carrefour de cette question et de celle de la gestion toujours plus efficace de la vie se détache la notion de systèmes qui semblent être aujourd’hui le pivot de la rationalisation du monde.

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Bifurcation dans la civilisation du capital

Un texte de Mohand
Il ne s’agit pas tant de suggérer que le capital peut aujourd’hui s’émanciper de l’humanité sur laquelle il extrait l’énergie nécessaire à sa production et à sa reproduction, mais de comprendre en quoi l’articulation d’une telle hypothèse avec le devenir catastrophique des conditions d’existence permet, peut-être, de ne pas tomber dans l’écueil d’une certaine « écologie politique » ; à savoir la généralisation et l’intensification du despotisme du capital et de la domestication de « l’humanité ».

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L’écologie, économie contre la vie

Un texte d’Ezra Riquelme
Aujourd’hui, l’écologie politique a pris du poil de la bête. Devenant le dernier combat d’une jeunesse métropolisée cherchant à sauver le peu qu’il leur reste. L’écologie politique intègre le champ des luttes révolutionnaires. Cette lutte désigne une distinction avec le terme écosystème, l’écologie politique introduit la question de la finalité d’une régulation des cycles et des équilibres biologiques. Elle se perçoit comme une conscience de notre environnement. Admettant par le même geste notre interdépendance avec les écosystèmes, que nous détruisons. Le geste politique de cette écologie est la tentative de sauvegarder les écosystèmes.

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Passion, liberté

La liberté s’articule autour de deux sentiments ou affects : le désir et la passion. Pour Levi, c’est sur ce seuil fragile d’une nouvelle inscription au monde d’avec l’universel indifférencié que se joue la passion. Absorbé dans un monde où les passions n’existent que trop peu, c’est précisément cela qu’il s’agit d’attraper à nouveau. La passion qui est le lieu de contact de l’individu avec le monde est ce qui permet au désir perdu dans l’immensité d’objets fictifs qui s’offrent à lui de comprendre quel est son objet réel. L’objet réel est le monde produit, la production du monde a toujours été la production de la séparation sujet-objet, c’est à travers le désir de transpercer cet objet réel que l’individu se libère en abolissant le rapport d’objectivité, en abolissant le monde comme objet séparé. Le monde qui s’est construit sur cette articulation est combattu par le désir et surtout la passion qui exprime le besoin d’un retrouver un rapport au monde qui soit autre qu’objectale. La passion dans ce processus de vouloir rentrer en contact avec le monde comme dépassement du rapport-objet tend aussi à abolir la subjectivité comme productrice du « monde », abolition de l’objet encerclant qu’est le monde en abolissant d’un même coup le sujet individuel.

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Le Parc Humain comme paradigme de la biopolitique positiviste moderne

Un texte de Louis René
Dans Le pouvoir souverain et la vie nue, Agamben définit le champ comme le paradigme de la biopolitique moderne. Il y a une autre forme de ce paradigme qui se joue à présent sans remplacer le paradigme décrit par Agamben, mais plutôt en effet le complète. Nous pouvons implicitement constater l’autre versant de ce paradigme par le prisme du Parc humain comme paradigme positiviste. Le plus que méprisable Peter Sloterdijk a eu au moins le mérite de percevoir la mise en condition du parc humain. L’actuelle recomposition du corps social, l’acquiescement au contrat social ne se fait plus par un accord verbal, mais par un accord vaccinal. Rejoindre la biocitoyenneté est une expérience que beaucoup ont fait, avec les regrets que l’on connaît. Ce qui se trame est la formation d’une nouvelle cité. Un nouveau parc humain en somme.

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Shelley, la désertion de la civilisation

Percy Bysshe Shelley fut animé toute sa vie par une grande flamme de la révolte qui brûlait en lui. Il n’a cessé de cracher sa haine et son dégoût à la face du monde. Celui-ci n’a cessé de nourrir sa colère, la réalité de l’injustice économique démesurée, la servitude complète des hommes obligés d’abandonner leur vie pour le travail, le sentiment d’une humanité qui se perd et se meurt dans des règles et modes de vie fictifs et détestables. Il rejetait de manière si féroce le monde à la fois dans ses œuvres que dans sa vie, ce n’était pas qu’une posture, mais une manière de vivre qui s’inscrit dans un profond sentiment révolutionnaire. Il avait le désir de vivre autrement, cela se ressent justement au sein de ses écrits, sans quoi évidemment on ne comprend d’ailleurs pas grand-chose à celle-ci. Dans ce récit trop peu connu de Shelley nommé Les Assassins que nous allons voir, il raconte ainsi une histoire qui reflète aussi ses désirs politiques et existentiels.

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Carlo Levi l’état de liberté face à l’État

Un texte d’Ezra Riquelme
Croupi dans les abîmes de la pensée, le mot liberté flotte inerte. Pourtant ces derniers mois ce mot a été repris avec vigueur par les voix des gilets jaunes et des autres personnes luttant contre le pass sanitaire et l’absurdité de l’obligation vaccinale. Une nécessité s’impose à nous, en entendant ces voix et les voix qui les méprisent. Prendre le temps de penser ce mot usé qu’est liberté. Défaire l’emprise que l’État ou de la religion du capital possède sur ce mot. Car il semple évident que se joue quelque chose dans le mot de liberté. Certainement un caractère bien plus politique que la devise républicaine française. Dans ce caractère politique se trouve un mouvement, passant d’un état un autre, un état de liberté. Ainsi, le texte Peur de la liberté de Carlo Levi apparaît comme essentiel pour s’armer dans le combat de la libération face à la tyrannie de l’Occident.

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De la liberté

La liberté est un mot qui fait horreur de nos jours. Souillé par le capital, par la modernité, oublié par les révolutionnaires et même par les libertaires. La liberté serait aujourd’hui une revendication d’extrême droite refusant de se soumettre à la vaccination de masse. Et pourtant la liberté a bien été reprise comme revendication minimale par les tentatives contre le pass sanitaire. Laissez le mot liberté serait une erreur grotesque et proclamerait la victoire de la pensée économique et démocratique sur ce terme.

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La véritable constitution de la terre :
à propos de La tension planétaire entre l’Orient et l’Occident de Carl Schmitt

Un texte de Gerardo Muñoz
Ces courtes gloses ont été écrites à l’origine comme une analyse textuelle accompagnant la publication d’un essai pour la section « Archives et Discours » de la revue Le Grand Continent il y a quelque temps, mais n’avaient jamais été publiées. Je les mets à disposition ici avec des modifications mineures, voire aucunes. Les commentaires suivent des fragments spécifiques de La tension planétaire entre l’Orient et l’Occident et l’opposition entre la terre et la mer de Carl Schmitt publiés dans Revista de Estudios Políticos 81 (1955) et se révèlent à la lumière de l’œuvre globale de Schmitt.

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Le fascisme, œuvre d’une toile de fond de la soumission

Dans un article intitulé « Réalisme et utopie dans La Personnalité autoritaire » qu’on retrouve dans la revue Prismes,Peter. E. Gordon accorde une analyse au livre ainsi qu’à la théorie articulée autour du concept de la « Personnalité autoritaire ». Il propose une lecture claire et fascinante qui s’inscrit dans un cheminement et une pensée philosophique plus globale qu’une simple considération psychologique que cet ouvrage nous donne au premier regard. Il va essayer de schématiser la conception de l’acceptation fasciste et du devenir fasciste analysé par les penseurs de la théorie critique.

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Démocratie Holocauste

Un texte d’Ezra Riquelme
La crise permanente de la démocratie est le symptôme de son despotisme paranoïaque. Il n’y a pas de crise de la forme démocratique. Les défenseurs de cette idée de crise tentent d’occulter le réel, ce qui se cache dernière ce rivage est tout bonnement les diverses tentatives de dislocation de la forme démocratique s’amplifiant d’année en année. La menace fasciste n’est pas une menace, elle est le moyen dont le dispositif démocratique tient. Quand le fascisme prend les rênes du pouvoir, il accomplit pleinement et simplement le despotisme autoritaire de la démocratie.

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Quatre positions du refus

Un texte de Gerardo Muñoz
J’irais jusqu’à dire que la stratégie du refus est quelque chose comme un dénominateur commun dans les positions critiques de la médiation politique. Bien que le refus puisse prendre plusieurs formes, j’ajouterais aussi que le refus est dirigé contre l’hégémonie au sens large (culturelle, politique, logistique, etc.). D’abord, le refus émerge de l’illusion que l’hégémonie contribue à toute véritable transformation substantielle ancrée dans le « réalisme politique ». Aujourd’hui, le réalisme est principalement employé comme un argument autonome visant à l’adhésion politique, même s’il ne fait que contribuer au statu quo et à la paralysie.

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Foucault contre Marx.
Refus de la totalité et perspectives stratégiques

Par ses concepts, Foucault démasque les mécanismes de domination cachés derrière les théories de la souveraineté et du droit. C’est un travail de dévoilement qui met au jour les techniques de pouvoir. Il met à nu les artifices symboliques de la souveraineté pour ne plus faire apparaître que les rouages et engrenages d’une colossale machine à gouverner qui constitue l’invariant métamorphique de la domination. À partir de là, on assiste à une désactivation des dispositifs qui ne permet pas de les réagencer pour en faire de nouveaux qui ne soient révélés. C’est un processus permanent de lutte qui se fonde sur de nouveaux principes évitant les écueils d’une organisation partisane pleine de microdominations. Un aggiornamento salutaire.

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Manifeste de Rivolta feminile — Rome, juillet 1970

Le Manifeste de Rivolta Feminile a marqué toute une génération de féministes durant les années 1970, lançant le féminisme de la différence qui prit corps dans les révoltes de femmes en Italie. Si le texte est critiquable sur de nombreux points, comme son binarisme et ses ontologies de l’homme et de la femme, plusieurs gestes de ce manifeste nous semblent néanmoins importants à partager par leurs caractères offensifs : le refus de l’universel masculin et marxiste, le refus de l’intégration normative : en somme, se défaire du social, pour partir de soi, c’est-à-dire partir d’expériences vécues pour élaborer une puissance de la révolte. Ce texte constitue à ne pas en douter une manière particulière de vivre le communisme.

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Camatte l’hérétique

Prendre au sérieux Jacques Camatte, pour les lecteurs de Marx quelque peu assidus, c’est accepter de commettre une hérésie. Se laisser porter par cette pensée, c’est se mouvoir au-delà des habitudes et des facilités. Elle est une de ces voix qui parle à soi contre soi, mais toujours depuis soi-même. Elle pousse à trahir ce qui se tenait là, devant nous, inébranlable comme une loi. Traversant la prophétie de Bordiga d’une révolution mondiale en 1975, depuis la théorisation de la contre-révolution, de l’émergence de la révolution (1968) jusqu’à son intégration, la pensée de Camatte accepte de se transformer sans renier ses origines. Il ne s’agit donc pas donc de faire jouer Marx contre Marx pour tenter pour la énième fois de le sauver, mais de jouer Marx contre l’époque depuis Marx et d’être forcé de le dépasser.

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Lukács, une dynamique de l’âme et des formes

Un texte de Pideme La Luna
Dans la pénombre, les rayons de soleil se font de plus en plus rares, les structures sociales liquident toute joie, toute possibilité de vivre sans elles, réduisant la vie à une expérience de laboratoire. Face à la vie biomédicale régnante, les différents axes du parti de la biopolitique poursuivent leur processus, le premier étant déjà bien organisé mondialement, le second essayant de s’organiser localement se pensant naïvement être l’antagoniste du premier. Pourtant, le second n’est rien d’autre qu’une arme diffuse de plus du premier. C’est ici que György Lukács peut nous aider dans cette quête de perception sensitive. Retrouver un sens dynamique à notre âme confinée.

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Frantz Fanon et les Sept Piliers de la Terre

Franz Fanon, qui a vécu dans sa chair la révolution et la guerre algérienne, s’inscrit clairement dans la lignée d’écrits de stratagèmes révolutionnaires. Il théorisera à partir de son expérience vécue, il sera le transmetteur par écrit de que ce toute la révolution algérienne amènera de nouveau dans l’idée de révolution, de ses composantes, dans l’idée de la guerre, de la guérilla, dans un contexte purement décolonial. Les thèses de Fanon que nous allons voir s’inscrivent dans ce cadre-là. La seule différence et non pas des moindres est que Fanon retranscrit ici une réalité vécue par les combattants algériens, il n’en est en rien le commandant, le général ou le théoricien. Fanon en est le spectateur.

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Blanchot, le changement d’astre

Maurice Blanchot n’est pas qu’un littéraire, qu’un homme qui écrit des romans éloignés du monde en s’enfermant dans son appartement. Il participera aux révoltes de son temps en y jetant son âme. Il n’aura jamais toutefois de parcours de militant professionnel rattaché à une organisation ou à une idéologie. Il restera toujours éloigné de ce monde dans une rigueur éthique, assez isolé à travers son désir continu de solitude, mais aussi paradoxalement bien entouré avec ces quelques amis avec qui il pensera et s’organisera.

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Bouleversement de la sensibilité générale par l’amitié

À travers des pensées communes, l’amitié fait office de soin. En disant cela, Mascolo nous dit que le processus qui amène à de nouvelles dispositions de pensée, c’est l’amitié, que le bouleversement général de la sensibilité a pour fondation une détresse partagée avec l’ami. L’amitié est ainsi ce qui permet ou résulte de ce bouleversement général de la sensibilité. Au fond nous pouvons dire que le bouleversement général de la sensibilité a lieu par la pensée qui se méfie d’elle-même et qui donc provoque en soi de la détresse.

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L’exigence communiste

Un texte de Louis René
On ne rencontre pas par hasard l’œuvre de Dionys Mascolo, et si on le fait, c’est souvent par la bienveillance d’un ami que nous posons notre regard sur ses écrits. Peu l’ont réellement lu de son vivant à part ses amis et quelques curieux personnages connus du monde de la pensée. Certains, comme Georges Bataille ou Gilles Deleuze, pour ne citer qu’eux, ont admiré l’œuvre de Mascolo. On doit certainement cet oubli, car en France, on lit les événements de Mai 68 sous le prisme mythologique de l’International situationniste ou bien par celui de la vision récente de la social-démocratie française. Face à cet oubli de mémoire, certains fossoyeurs du vieux monde sont allés déterrer ses écrits.

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L’état d’exception à l’époque de sa reproductibilité technique

Un texte de Flavio Luzi
L’introduction du concept de risque dans la déclaration de l’état d’exception implique l’introduction de ce dernier dans la sphère de la probabilité et de l’indéterminé. Ce n’est toutefois rien de plus que son passage du cadre de la souveraineté et de l’exception à celui du gouvernement et de la régularité. Cela sanctionne non seulement l’échappement de l’état d’exception en dehors du jus publicum europaeum, mais aussi sa consécration définitive comme technique de gouvernement.

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La métaphore de l’ennemi invisible

Un texte de Flavio Luzi
Avec tout le raffut médiatique de ces derniers mois, difficile d’avoir raté la tendance répandue dans la classe dirigeante, et l’opinion publique, à recourir au lexique militaire quand il s’agit de se référer à la situation déclenchée par la diffusion du COVID-19 : l’épidémie — ou plutôt la pandémie — ne serait rien de moins qu’une « guerre » impliquant toute la planète. Le point de départ de la pensée biomédicale moderne résiderait justement dans cette désignation métaphorique, non plus de la maladie en tant que telle, prise de façon générique, mais d’organismes pathogènes particuliers, visibles à l’aide d’instruments comme le microscope. Mais quel genre de guerre peut être une guerre contre un virus ?

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Comité invisible, « Beau comme une insurrection impure »

Un texte de passeurs franco-italiens
Le texte qui suit forme la préface à l’édition italienne des trois premiers livres du Comité invisible réunis en un volume, publiée en février 2019. Si cette préface a connu à ce jour des traductions en plusieurs langues, il n’en existait curieusement aucune version française. La voici enfin. Son actualité n’échappera à personne.

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Politique conspirative

Un texte de Mischka
Ce que nous vivons depuis deux ans déjà avec le covid montre notre capacité d’adhésion envers le mensonge. Si le virus existe bel et bien, la gouvernementalité mondiale et ses amis industriels, eux aussi existent bel et bien. Leurs intérêts n’ont jamais été notre santé. Chaque gouvernement a le devoir de tenir sa population en laisse, quant à l’industrie pharmaceutique, elle a le devoir de générer un maximum de profit à leurs actionnaires. Si cette période a vu fleurir le grand retour du conspirationnisme.

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Spleen conpiratif

Nous vivons dans l’une des époques les plus oppressives qui soit, nous le savons tous. Nous sommes sous le règne absolu du capitalisme et de tous ses ravages évidemment, sous le règne absolu de la démocratie et de son totalitarisme évidemment, sous le règne absolu des outils et des techniques de propagande évidemment, sous le règne absolu des dispositifs de contrôle de plus en plus nombreux évidemment. Jamais nous n’avons été autant en proie à l’aliénation qu’aujourd’hui.

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